Le Conseil tiendra une grande place da le régime que je veux instituer.Plus le chef, en effet, se sent seul à tête de l'État, plus est haute sa situation plus il éprouve le besoin de s'entourer de conseils.
Il est entendu que le Chef doit être libre de sa décision. Mais, lorsqu'il a fait connaître ses intentions, il vous appartient de lui apporter les suggestions que vous croyez utiles, pour l'aider à choisir les matériaux, à les assembler harmonieusement, à jeter la lumière sur l'ensemble.
Ma venue a aussi pour motif de recevoir votre serment.
Depuis le jour où, par la force irrésistible des circonstances, plus encore. que par la volonté des hommes et surtout de moi-même, j lai été placé à la tête de l'État j'ai multiplié les appels au bon sens, à la raison, à la notion de l'intérêt publie. J'ai réclamé avec insistance le concours et la bonne volonté de tous les Français. Aujourd'hui, le temps des équivoques est passé.
Il reste peut-être encore des insensés qui rêvent de je ne sais quel retour d'un régime dont ils étaient les profiteurs. Je suis sûr que la Révolution Nationale triomphera pour le plus grand bien la France, de l'Europe et du Monde.
Quoi qu'il en soit, il faut se prononcer. On est avec moi ou contre moi, et cette pensée est surtout vraie pour les serviteurs de l'État, et d'abord pour vous qui êtes les premiers.
Telle est la portée du serment que je suis venu entendre.
La gravité du péril intérieur et extérieur rend plus affirmative que jamais ma résolution de m'appuyer sur tous les éléments sains d pays., rassurés par ma volonté de mettre le autres hors d'état de nuire.
Je maintiendrai l'ordre matériel. Mais cel ordre ne suffit pas à satisfaire mes plus hantes et mes plus chères ambitions. Il me faut If concours cordial du pays. J'espère l'obtenir.
Je veux rétablir la prospérité matérielle et j'y parviendrai, dès que l'horizon informational se sera éclairci.
Je veux la répartition plus juste, plus humaine, plus fraternelle des produits du sol C'est l'oeuvre la plus urgente.
J'ai le souci de l'enfance, printemps de la nation.
Je pense aux pères de famille, « ces grandi aventuriers des temps modernes », comme les a définis un sociologue.
Ma sollicitude paternelle, qui s'étend à tous va d'une façon particulière à ceux qui s'usent aux besognes les plus ingrates pour la rémunération la plus modeste et la plus incertaine.
Mais la réforme matérielle ne me satisfait pas. Je -veux par surcroît la réforme morale. Je veux assurer à mes compatriotes le réconfort de certitudes éternelles : la vertu, dont j 1) ose dire le nom démodé, la Patrie, la discipline, la famille et ses moeurs, la fierté, le droit et le devoir du travail.
J'ai ressenti, plus amèrement peut-être que tout autre, la tristesse de l'abaissement de la Patrie, mais je connais aussi la possibilité des réactions de salut.
J'ai multiplié, et je continuerai les multiplier, les contacts directs, non seulement avec de grands organismes comme le votre, mais avec le peuple lui-même, auquel je m'adresse directement, qui me parle sans intermédiaire.
J' ausculte le coeur de la Nation et, en dépit des efforts des mauvais bergers, je le trouve sain.
J'ai été heureux de constater que le sentiment de la liberté reste vivace dans l'esprit toujours fier du peuple français.
Mais un peuple libre est celui où chacun est sujet de la loi et où la loi est plus puissante que tout le monde. C'est là le principe du régime que j'entends fonder et que j'édifie patiemment, au milieu de difficultés sans nombre.
Après la paix, le premier besoin des peupl est l'ordre, l'ordre dans les choses dans les institutions, dans la rue, dans les esprit.
Sans ordre, pas de prospérité, pas de libertés.
La grandeur de votre mission vient de que vous êtes l'organe de la régularité dans l'administration et dans la gestion des services publics.
Tout porte donc à croire que, dans la France de demain, le Conseil d'Etat, animé de l'esprit nouveau du régime, saura jouer son rôle.
Messieurs, j'attends maintenant votre serment.
(Ce discours a été prononcé à Ro par M. le Maréchal Pétain devant MM. les Membres du Cons d'État, réunis en Assemblée génér solennelle à l'occasion de la preste du serment.)