Appel

du 3 novembre 1943

 

Français,

À l'approche des hivers 41 et 42, j'ai fait appel à votre générosité. Vous avez répondu magnifiquement.

Un nouvel hiver commence, les réserves du Secours national s'épuisent. Peut-être n'avez-vous pas mesuré son immense effort ? Si vous l'aviez vu à pied d'oeuvre auprès des sinistrés à chaque bombardement, si vous visitiez ses ouvroirs, ses centres d'hébergement, ses colonies de vacances qui accueillent des centaines de milliers d'enfants réfugiés, vous ne douteriez pas des méthodes employées et des services rendus par cette oeuvre admirable.

Je vous demande d'accomplir une fois encore votre beau geste des années précédentes, et de donner au Secours national le moyen de continuer sa tâche.

Une nation n'est pas seulement un groupement d'intérêts matériels. C'est une communauté où l'entraide est un devoir.

Nous trouvions naturel autrefois de prendre notre part de la prospérité générale. Nous n'avons pas le droit aujourd'hui de nous soustraire à la détresse commune.

Etre Français, c'est accepter de participer aux souffrances des Français malheureux comme à leurs espoirs.

Paysans, vos difficultés s'aggravent chaque saison,* lais il y a des ouvriers qui ont faim.

Bourgeois, vous voyez fondre vos ressources. Mais des milliers de réfugiés n'ont pas retrouvé leur toit et d'autres ont û fuir les bombardements.

Vieilles gens, vous êtes attristées par la gêne et la solitude Songez à ceux qui souffrent hors de leur pays.

Tous, vous surmonterez mieux vos malheurs en ouvrant otre coeur au malheur des autres.

Je m'adresse surtout à ceux qui sont le moins éprouvés. Qu'ils sachent bien qu'une situation personnelle n'est assurée dans un pays bouleversé par la misère si l'on ne vient à son secours

À celui qui refuse aujourd'hui de donner quelque chose par amour, tout sera peut-être emporté demain par la haine.

Devant la menace d'une ruine totale, qui pourrait refuser un sacrifice partiel ?

J'ai maintes fois demandé, et avec quelle insistance, rétablir entre vous l'accord des pensées. je n'ai pas toujours '-té entendu. Acceptez aujourd'hui dans un élan de générosité la discipline des coeurs. Y a-t-il pour vous une meilleure occasion le réaliser l'union que celle qui vous est demandée au nom du Secours national ?

Vous retrouverez par là le chemin du devoir et vous participerez au relèvement de la France en sauvant des Français.